Cuvée Noire - Bastille - Coffee Shop
Coffee Shop — La Roquette (Paris)



À propos
Cuvée Noire is a Bastille coffee shop pioneering 'coffee raves' where local and international DJs mix during daytime in a relaxed setting. Part of the sober and creative party movement, the establishment offers a unique musical experience that reinvents traditional clubbing codes, focusing on atmosphere, artistic proximity, and well-being.
Mentions
14 K vues · 36 réactions | Découvrez la toute nouvelle adresse du délicieux coffee shop : Cuvée Noire 🤩 ☕️ 📍8 Rue de la Roquette, 75011 Paris | Paris Secret
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Le clubbing est-il soluble dans le latte ?
De la musique électronique énervée, un DJ en transe rivé à ses potards et une foule de danseurs ravis, les bras en l’air... La description d’une nuit en club comme tant d’autres ? Erreur ! Il s’agissait d’un après-midi d’octobre chez French Bastards, la boulangerie à Oberkampf ! Derrière les platines et entre les viennoiseries, après Bob Sinclar au printemps, c’était Bambounou qui mixait tandis que Peggy Gou servait des croissants. Mais ces derniers mois, on aurait pu aussi voir le DJ libanais Char Bell retourner le coffee shop Leone dans le 3ᵉ ou le Londonien Louis Bekk mixer chez Cuvée Noire à Bastille. LA FÊTE, AVEC DES MIETTES Derrière toutes les apparences (parfois surjouées) d’une nuit classique, ces « coffee raves » se démarquent du monde du clubbing : elles se déroulent en journée, l’alcool y est absent et la seule poudre présente est le chocolat sur les cappuccinos. L’avenir du clubbing se lit-il dans le fond d’une tasse d’expresso ? Si l’on fait exception du clip « Ce matin va être une pure soirée » de Fatal Bazooka (quinze ans déjà !), on peut dater l’arrivée de la fête dans une boulangerie à 2019, avec la première Bakery Session lancée par le DJ Aazar, alias Alexis Duvivier : « En fait, on voulait juste faire la fête ailleurs qu’en club. J’ai eu l’idée de fêter le lancement d’un morceau dans une boulangerie, car ça permettait de retrouver l’intimité avec ceux qui suivaient ma musique et de remettre de la proximité avec les artistes dans un endroit cosy. » Surfant sur l’engouement mondial pour les coffee shops (mais il y en a eu aussi dans une crêperie ou une salle de Pilates), le concept a essaimé à Amsterdam, Londres ou Pékin. COMPLÉMENT DE LIEU La fête a toujours cherché à se glisser là où on ne l’attend pas : dans les entrepôts abandonnés (comme à Berlin en 1990), au bas des immeubles (les fameuses block parties du New York des 70’s), dans les bois (ambiance free party). En 2005, les gentils agitateurs parisiens de Contract avaient piraté un wagon de la 7 bis pour le transformer en club ultra-éphémère. Alors pourquoi pas dans une boulangerie ou une salle d’escalade ? Pour Aazar, cela semble aller de soi : « Le format de la musique électronique n’avait pas évolué depuis 25 ans : toujours la nuit, toujours en club. Les gens en ont fait un peu le tour et ils veulent de la nouveauté ! » Finalement, qu’importe le lieu, tant que l’esprit de la fête reste présent ! Arnaud Idelon, auteur de Boum Boum, politiques du dancefloor (éditions Divergences, 2025), renchérit : « La fête est partout, possède cette capacité de se métamorphoser sans cesse et d’inventer de nouveaux territoires d’expression. La fête en journée, la fête en appartement, la fête en rondes plutôt qu’en lignes sont d’autres territorialités qui ne cessent d’apparaître au gré des désirs individuels et collectifs et qui disent que la fête ne se fixe pas dans une forme, mais les dépasse dans un éternel mouvement. Ce n’est pas l’espace seul qui fait la fête ! » PERCOLER DU CONCEPT Le clubbing, inventé dans les années 70, ou les raves vingt ans plus tard, se sont aussi déployés dans des espaces inédits (des théâtres détournés, des friches industrielles) parce qu’il n’y avait pas d’autres possibilités. La nécessité vitale de lieux de fête, pour échapper à la crise (ou à la police), dictait cette nouvelle géographie festive. Ici, c’est plutôt l’injonction à l’originalité qui prédomine, et l’idée se pare des symboles de la fête pour accoucher d’un concept rentable : le boulanger espère un boost de notoriété, le DJ s’offre un set reposant, l’organisateur se place sur l’échiquier de l’événementiel parisien… On est loin de l’utopie sybarite du Loft de Mancuso ! La dernière Bakery Session en date a d’ailleurs eu lieu dans un concept store du 10ᵉ où, sur des étagères, trônaient des dizaines de baguettes. Les gens dansaient donc non plus dans une boulangerie, mais dans le simulacre d’une boulangerie, lui-même simulacre d’un club. Le concept au carré ! « La fête n’est alors plus que décorum : feintise collective d’un temps hors temps, alors même que tout n’est que confirmation du même monde », assène Arnaud Idelon. LA DANSE DU SOBRE Au-delà des lieux inédits, ces fêtes se réinventent surtout en remettant la sobriété et la mesure au centre de la piste. Lors de ces coffee raves, on ne consomme que latte ou matcha. Et Paris a vu, en septembre, sa première Clean Party, une fête où alcool (et drogues, cela va sans dire) étaient proscrits. Cela entre en résonance avec les résultats des sondages sur les conduites à risque, comme cette étude de l’OFDT qui montre, par exemple, qu’entre 2022 et 2023, la consommation d’alcool a diminué de 3,8 % en France. La jeunesse française fait plus attention à sa santé : elle fume moins, boit moins, se drogue moins. Rose, DJ et organisatrice de la Clean Party, explique : « Le principe est simple : faire la fête sans faire mal à son corps, ni par la prise de substances nocives, ni en le privant de sommeil. Aujourd’hui, c’est la norme de se défoncer et je dois me justifier de rester sobre alors que ça devrait être l’inverse.» PLUS CLAIRE, PLUS INCLUSIVE Pour Arnaud Idelon, pas de doute : « Bien sûr qu’il est possible de faire la fête sobre. Bien sûr que l’on peut être ivre de danse. Cela représente aussi l’expression d’une certaine inclusivité : la fête sobre ouvre à des formes plus intergénérationnelles, plus familiales, faisant entrer dans la ronde celles et ceux qui – pour différentes raisons, qu’elles soient culturelles, religieuses ou qu’elles aient trait à une condition physique – ni ne boivent ni ne se droguent. » Rose analyse trois types de publics concernés : « Ceux qui consomment et veulent essayer par curiosité, ceux qui ne prennent plus et veulent sortir sans être tentés, ceux qui n’ont jamais consommé et ne veulent pas être entourés par des gens défoncés. » Soit, sur le papier, un beau panel de clients potentiels ! Aazar y voit, lui, le moyen de sortir plus serein : « Les gens se retrouvent, passent un bon moment entre 18 h et 22 h. Le lendemain, ils pourront enchaîner leur journée sans douleur… et moi le premier, étant jeune papa ! » La fête devient compatible avec la performance... Pour Arnaud Idelon : « Cette “fête raisonnable” remplace la dynamique habituelle de rupture dans le quotidien que provoque la fête par une sorte de continuité : la fête ainsi n’est plus un temps extraordinaire, elle s’intègre à un continuum productif et normé, voire peut être vue comme une manière positiviste de se régénérer, à l’instar d’un cours de yoga ou de Pilates. » Et si on envisageait une voie médiane où, pour faire écho au manifeste de Benoit d'Onofrio, ni la sobriété ni la défonce ne serait obligatoire… Pour que chacun(e) fasse sa propre fête.
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